En attendant le dépôt par le préfet Marx de son rapport sur l’évolution institutionnelle de l’Alsace, les tenants d’une Alsace étriquée font le forcing. Le président du Grand Est, le président de l’Eurométropole de Strasbourg et en particulier les élus de gauche de la métropole souhaitent, il faut bien proposer quelque chose, une fusion sèche des deux départements alsaciens qui en vérité n’apporterait rien. Le peuple des électeurs alsaciens n’est pas à ce point dupe ou manipulable pour s’en contenter. Il attend autre chose. Ce qui ressort du débat qui traverse plus que jamais la société alsacienne au sujet de son avenir politique et institutionnel, c’est qu’il lui a permis de développer une véritable culture politique autour du sujet. Elle ne veut pas avancer à reculons et entend aller de l’avant avec des solutions positives.
La vieille rengaine de la République une et indivisible ne l’émeut plus, tant elle a compris, elle qui voit qu’au-delà du Rhin, en Allemagne et en Suisse, un autre développement de la démocratie est possible, que la vraie modernité était au post-nationalisme et au droit à la différenciation, à la levée des tutelles d’un autre âge et à la libération des énergies et des potentialités. Elle entend défendre et obtenir une institution politique propre pour définir et gérer au mieux ce qui est propre, ce qui n’interdit en rien de gérer avec d’autres le bien commun.
Elle a compris qu’il fallait plus d’Alsace pour un mieux-être et vivre ensemble alsaciens ! Et que pour ce faire, il fallait une institution propre, tout simplement parce que les institutions instituent et qu’il s’agissait d’instituer ce que l’Alsace a de particularismes et de besoins en matière de bilinguisme et de double-culture, de « transfrontalité », d’économie, de transports, d’attractivité, de tourisme, d’écologie et de médias. Ce qui n’est pas institué n’a pas de corps et n’existe que dans les représentations mentales, sans réalité tangible.
L’autre vieille rengaine, celle du « repli identitaire » ou « du combat d’arrière-garde », ne prend pas davantage. Les Alsaciennes et les Alsaciens sont en attente d’une argumentation d’une certaine profondeur intellectuelle. En réalité, celles et ceux qui agitent ces spectres tentent, faute de pouvoir justifier l’injustifiable, d’agiter le peuple avec l’espoir de mieux pouvoir s’en servir électoralement. Accuser les autres des maux dont on est soi-même porteur, cela eut payé, mais cela ne paie plus dans une Alsace désormais politiquement majeure. Pierre Klein