Mouvement pour l’Alsace – Initiative Citoyenne Alsace – Club perspectives Alsaciennes
Associations d’hommes et de femmes de tous horizons qui réfléchissent librement aux problèmes de notre société, nous sommes affligés par la pauvreté et la confusion du débat politique en Alsace sur un sujet qui fait un si large et si constant accord de nos concitoyens. La consultation citoyenne sur le rétablissement d’une Région Alsace organisée par la Collectivité européenne d’Alsace confirme l’adhésion claire et massive des citoyens à ce projet. Elle a également démontré l’incapacité du Grand Est à exposer les bénéfices que la population tire de l’existence de la méga-région et, corrélativement, l’absence de mobilisation populaire en faveur du non. Un troisième enseignement est la difficulté d’une démocratie participative en France, objet de déclarations pompeuses sur le principe et de rafales de critiques lorsqu’elle est mise en œuvre.
La participation citoyenne : procédure louangée et pratique chahutée
Pour les collectivités locales, où ces procédures sont les plus appropriées, les possibilités prévues par la loi sont si encadrées et complexes qu’elles sont peu utilisées (référendum) ou fonctionnent mal (enquêtes publiques). Les élus doivent donc inventer des voies dont les modalités et résultats sont immédiatement matière à arguties. L’innovante consultation sur la Région Alsace a ainsi suscité un impressionnant florilège de désinformations, de comparaisons fallacieuses et d’insinuations fielleuses.
La réponse que l’on aurait pu attendre du président Rottner était un apitoiement pour des Alsaciens aveuglés qui n’ont pas vu tous les bienfaits qu’ils perdront en quittant le Grand Est, au lieu de quoi lui et ses adeptes se perdent en sophismes emberlificotés sur la valeur de la consultation selon une stratégie bien rodée : détourner l’attention de la question posée, chercher à discréditer le vote des citoyens et noyer le débat.
Avaient ainsi été lancées des interrogations suspicieuses sur les modalités de la consultation. Un géographe écrit doctement que l’expression populaire introduit du « flou », terme vraiment peu judicieux en l’occurrence. En Conseil de CEA un élu a parlé de « mascarade » et de « bourrage d’urnes », imputations dont l’orateur n’a sans doute pas mesuré la signification. Ce niveau d’arguments révèle une inquiétante vacuité de la pensée politique et un refus de débats francs pour éclairer les citoyens.
Des comparaisons trompeuses
Une technique largement utilisée a été la comparaison où l’on choisit une référence qui mettra cette consultation d’office en position d’infériorité. Comparer, comme le fait le communiqué du président de la région, le nombre de votants en un jour au référendum de 2013 à celui de la consultation CEA qui a duré deux mois, n’a pas de sens. En quoi des votes étalés sur une période de temps seraient-ils moins valides que ceux déposés en un jour ? Au demeurant, le référendum de 2013 avait été précédé de deux ans de débats publics.
Un autre argument abscons énonce qu’il y a eu plus de non au référendum de 2013 que de oui à la consultation de 2022. L’auteur oublie qu’alors le problème central était la fusion des deux départements et que c’est sur ce sujet que le non haut-rhinois a été majoritaire. Or, grâce à l’électrochoc de la fusion des régions, l’union des départements est acquise et a donné naissance à la CEA, événement historique dont on sous-estime l’importance. Sa transformation en région est une évolution naturelle qui finira par se faire et pour laquelle il devrait y avoir consensus absolu de toutes les forces politiques alsaciennes.
Particulièrement incongrues sont les comparaisons avec les votations suisses, procédures totalement différentes. Les électeurs sont appelés à adopter ou rejeter un texte de loi ou une réforme précise. En bonne logique démocratique s’y affrontent des défenseurs du oui et du non. Dans la consultation CEA les sympathisants du Grand Est, au lieu de préconiser le non, ont répandu des propos tarabiscotés pour délégitimer la consultation. Inimaginable en Suisse !
Leçons de morale et dérive identitaire : de quoi parle-t-on ?
Un autre angle d’attaque est la leçon de morale prodiguée par l’exécutif régional, réputé pour son éthique politique. Apprécions le conseil quant à la modestie que devrait imposer, dans l’appréciation des résultats, le nombre de votants par rapport à celui des électeurs. Le même homme politique avait obtenu au scrutin régional 137 687 voix qui lui permirent de déclarer qu’avec l’élection de sa liste « le débat est clos » sur l’avenir institutionnel de la région, bien que lors de la campagne il n’avait jamais évoqué ce sujet.
Un argument mille fois ressassé, et toujours aussi sot, est repris par une vice-présidente de la région qui a déclaré : « Cette démarche alsacienne est une forme de repli identitaire, de repli sur soi … » Mille preuves attestent qu’il n’y a pas de région et de population plus ouvertes sur le monde que les nôtres. S’appuyer sur une identité culturelle, historique et affective est une valeur et une force dans le monde d’aujourd’hui. S’il y a une dérive identitaire, elle est dans la volonté d’imposer à coup de millions d’euros une inepte « identité Grand Est ».
L’attachement à un Grand Est que personne n’a voulu, qui n’a aucun argument positif à faire valoir, est rejeté par les populations et considéré par tous les experts comme une erreur grossière de l’architecture territoriale est incompréhensible. Les conseillers régionaux ont été élus pour faire fonctionner les TER et les lycées, accorder des soutiens à l’économie et non pour défendre une loi dont ils ne sont pas les auteurs, que beaucoup d’entre eux avaient refusée et dont tous connaissent les vices de conception.
Nos associations militent depuis longtemps pour le rétablissement d’une région Alsace. Il fallait cependant un geste politique fort pour faire entrer cette revendication dans le débat national, là où cela se décidera. Ce débat est maintenant ouvert grâce à une mobilisation citoyenne réussie, sur l’initiative courageuse du Président Bierry. Il ne sera plus refermé et le changement sera mené à son terme. Chacun devra prendre ses responsabilités à l’occasion des prochaines élections.