Un faisceau d’informations nous fait croire que le Président Hollande n’engagera pas la procédure de ratification de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires. Du moins pas dans l’immédiat. Alors que c’était une de ses promesses électorales. Nous le déplorons vivement. Le fera-t-il demain ? Tant de fois, on nous a donné du grain à moudre. Tant de fois, nous avons été déçus… Certes, la ratification n’aurait pas permis de résoudre tous les problèmes liés aux langues régionales de France, mais elle aurait constitué un symbole fort. Elle aurait déjà permis à la France d’envoyer un signal aux autres pays européens, qui sur ce sujet l’observent, étonnés qu’elle exige des nouveaux pays adhérents qu’ils ratifient la Charte, ce qu’elle ne fait pas elle-même. Pour beaucoup, la France apparaît ce faisant comme étant le pays des droits de l’homme, moins un.
Rappelons que cette Charte est entrée en vigueur en 1998. Elle a été signée par la France en mai 1999 par le gouvernement Jospin, mais en juin de la même année, saisi par le Président Chirac, le Conseil Constitutionnel à déclarer qu’elle n’était pas conforme à la Constitution française. N’aurait-on alors pu entreprendre une procédure de modification de la Constitution ? Il n’en fut rien. Rappelons qu’il n’existe à ce jour en France qu’une seule loi exclusivement consacrée aux langues régionales, la loi dite Deixonne de 1951. Encore est-elle abrogée, encore ne faisait-elle pas référence à la langue régionale d’Alsace.
Les forces contraires, jacobines, restent très fortes. Celles qui confondent égalité et uniformité. Celles qui font reposer la nation française sur des données objectives, comme l’unicité de la langue, de la culture, de l’histoire, du territoire, ce qui revient à la considérer comme une nation objective, comme une ethnie, wie ein Volk. et qui font passer le pacte civil et social, c’est-à-dire la nation subjective, au second plan. Celles pour qui le principe de l’union dans la diversité et le post-nationalisme, c’est bon pour les autres, mais pas pour la France, qui est ce qu’elle est et doit le rester. Ces forces, qui d’ailleurs traversent toutes les familles politiques, sont très actives et. Comment expliquer autrement que le projet de loi sur les langues régionales reste dans les tiroirs de la République et que ceux sur la décentralisation et sur l’école ne présentent aucune avancée.
Néanmoins, il ne faut pas désespérer de la France. D’autres modalités que la Charte européenne sont possibles et à obtenir. A commencer par une loi. Mais tant de propositions de loi ont déjà été présentées par des parlementaires, une bonne cinquantaine depuis 1951, qui n’ont jamais été discutées au Parlement. Jamais non plus un projet de loi est venu du gouvernement, qu’il soit de droite ou de gauche. Rien dans ce domaine n’a jamais abouti !
Appelons nos élus à reconsidérer la chose et à obtenir du gouvernement qu’il ouvre, à défaut de ratification, une procédure d’élaboration d’une loi en faveur des langues régionales ou minoritaires de France leur conférant reconnaissance et existence sociale. Appelons-les aussi à obtenir des Collectivités Territoriales des régions concernées qu’elles se dotent de Chartes linguistiques propres à promouvoir les langues régionales ou minoritaires. Appelons-les à faire ce qui peut d’ores et déjà être fait, par l’Etat, les Régions, les Départements et les Communes. Et beaucoup plus que ce qui se fait peut être entrepris dans le cadre légal existant. Ce qui ne sera pas demandé, ne sera pas obtenu. Alors citoyennes et citoyens d’Alsace, allons-y, demandons ! PK